Épijournal de Géométrie Algébrique epiga.episciences.org Volume 4 (2020), Article Nr. 5 Sur l’existence du schéma en groupes fondamental Marco Antei, Michel Emsalem, et Carlo Gasbarri Résumé. Soient S un schéma de Dedekind, X un S-schéma connexe localement de type fini et x ∈ X(S) une section. L’objet du présent papier est d’établir l’existence du schéma en groupes fondamental de X lorsque X est à fibres réduites ou quand X est normal. Sous des hypothèses de normalité, on démontre aussi l’existence d’un schéma en groupes, qu’on appellera schéma en groupes fondamental quasi-fini de X en x, qui classifie tous les torseurs quasi-finis au dessus de X, pointés au dessus de x. On introduit les torseurs galoisiens, qui jouent dans ce contexte un peu le rôle des revêtements galoisiens dans la théorie du groupe fondamental étale. Mots-clés. Torseurs; schéma en groupes fondamental; schéma en groupes Classification mathématique par matières (MSC 2010). 14G99, 14L15, 14L30; 11G99 [English] On the existence of the fundamental group scheme Abstract. Let S be a Dedekind scheme, X a connected S-scheme locally of finite type and x ∈ X(S) a section. The aim of the present paper is to establish the existence of the fundamental group scheme of X, when X has reduced fibers or when X is normal. We also prove the existence of a group scheme, that we will call the quasi-finite fundamental group scheme of X at x, which classifies all the quasi-finite torsors over X, pointed over x. We define Galois torsors, which play in this context a role similar to the one of Galois covers in the theory of étale fundamental group. Received by the Editors on May 7, 2019, and in final form on November 27, 2019. Accepted on March 28, 2020. Marco Antei Escuela de Matematicas, CIMPA, Universidad de Costa Rica, Ciudad universitaria Rodrigo Facio Brenes, Costa Rica e-mail: marco.antei@ucr.ac.cr Michel Emsalem Laboratoire Paul Painlevé, U.F.R. de Mathématiques, Université des Sciences et des Technologies de Lille 1, 59 655 Villeneuve d’Ascq, France e-mail: emsalem@math.univ-lille1.fr Carlo Gasbarri IRMA, UMR 7501 7 rue René-Descartes 67084 Strasbourg Cedex, France e-mail: gasbarri@math.unistra.fr Marco Antei a reçu le soutien du projet TOFIGROU (ANR-13-PDOC-0015-01). Michel Emsalem a reçu le soutien du Labex CEMPI (ANR-11-LABX-01). Carlo Gasbarri a reçu le soutien du projet ANR-16-CE40-0008, FOLIAGE. © by the author(s) This work is licensed under http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/ ar X iv :1 50 4. 05 08 2v 7 [ m at h. A G ] 6 J un 2 02 0 http://epiga.episciences.org/ epiga.episciences.org http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/ 2 M. Antei, M. Emsalem et C. Gasbarri2 M. Antei, M. Emsalem et C. Gasbarri Table des matières 1. Introduction. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 2. Préliminaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 3. Réduction de schéma en groupes structural . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 4. Le schéma en groupes fondamental . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 5. Torseurs galoisiens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 6. Appendice : Le contre-exemple de Jilong Tong . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 Références . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 1. Introduction 1.1. Objectifs et plan du travail Soit (X,x0) un schéma connexe pointé. Le groupe fondamental πét1 (X,x0) de X classifie les revêtements étales finis de X, plus précisément il classifie les torseurs sur X sous des schémas en groupes finis étales : les revêtements galoisiens étales sont en bijection avec les quotients finis de πét1 (X,x0). Comme déjà mentionné dans SGA1, dans plusieurs situations naturelles, on voudrait avoir à sa disposition un schéma en groupes qui classifie les torseurs sur X sous des schémas en groupes finis et plats (et non seulement étales) sur une base fixée S . On ne sait pas si un tel schéma en groupes existe toujours. Quand on sait prouver son existence, on l’appellera le schéma en groupes fondamental de X sur S et on le notera π1(X,x0). Pour construire le schéma en groupes fondamental de X sur S , on est confronté au problème suivant : on considère la catégorie P (X) des triplets (Y ,G,y0) où G est un schéma en groupes fini et plat sur S , Y est un G-torseur sur X et y0 est un S-point de Y au dessus de x0. Si cette catégorie est cofiltrée, alors le schéma en groupes fondamental de X sur S existe (et il est la limite projective des schémas en groupes G qui interviennent dans la définition de la catégorie). Le fait que cette catégorie soit cofiltrée n’est pas toujours facile à vérifier. L’existence du schéma en groupes fondamental pour des schémas réduits et connexes sur un corps a été établie dans l’article fondateur [Nor82]. L’étape suivante est d’étudier le cas où la base S est un schéma de Dedekind. Soit f : X → S un morphisme muni d’une section x0 ∈ X(S). Dans cet article on démontre l’existence du schéma en groupes fondamental π1(X,x0) quand au moins une des deux hypothèses suivantes est vérifiée : (A) X → S est séparé, fidèlement plat, localement de type fini et pour tout point s ∈ S , la fibre Xs est réduite. (B) X → S est séparé, fidèlement plat, localement de type fini et pour tout point x ∈ X \Xη , l’anneau local Ox est intégralement clos, où η désigne le point générique de S . En particulier le schéma en groupes fondamental de X sur S existe si X est connexe et normal. Ceci est souvent suffisant pour les applications. On généralise ensuite cette étude à la question de l’existence du groupe fondamental schématique qui classifie les torseurs sous des schémas en groupes quasi-finis sur S . On montre qu’il existe pour des schémas qui vérifient la propriété suivante : (C) X→ S est localement de type fini, séparé, fidèlement plat, et pour tout point s ∈ S , Xs est intègre et normal (en particulier X est intègre et normal, comme on le rappellera en début de la section 4). Schéma en groupes fondamental 3Schéma en groupes fondamental 3 Le plan de ce travail est le suivant : après des préliminaires techniques, on étudie dans la section 3, pour un G-torseur sur X, à quelle condition l’existence d’une réduction de schéma en groupes structural à un sous-schéma en groupes fermé de G passe d’un ouvert dense de X à X lui-même. Ce sera la clef de la preuve dans la section 4 du fait que sous (A) ou (B), la catégorie P (X) est cofiltrée, et de la propriété similaire pour les torseurs sous des schémas en groupes quasi-finis. Dans la section 5, on introduit les notions de torseurs galoisiens et quasi-galoisiens, outils qui nous permettront, sous certaines hypothèses de comparer la restriction à un ouvert U dense dans X du schéma en groupes fondamental de X et du schéma en groupes fondamental de U . Dans l’article [Gas03], le troisième auteur prétendait avoir prouvé que la catégorie P (X) est cofiltrée quand X est un schéma irréductible, réduit et fidèlement plat sur S . Malheureusement dans cette preuve il y a une faute : le lemme 2.2 de op. cit. est faux, comme le montre le contre-exemple de J. Tong présenté au paragraphe 6. La construction du schéma en groupes fondamental sous ces hypothèses sur X s’avère être encore un problème ouvert. Remerciements Nous tenons à remercier Jilong Tong, qui nous a autorisé à présenter ici son contre-exemple, décrit à la section 6, Hélène Esnault pour son intérêt pour notre travail au travers de nombreux échanges et Matthieu Romagny pour sa contribution à la preuve du corollaire 2.2. 2. Préliminaires 2.1. Notations Dans cet article S désignera un schéma de Dedekind, i.e. un schéma localement noethérien, irréductible et normal de dimension 0 ou 1, dont on notera par η = Spec(K) le point générique. Partout dans le texte un morphisme de schémas sera dit quasi-fini s’il est de type fini et si chaque fibre est un ensemble fini de points. On se donne un S-schéma séparé, localement de type fini et fidèlement plat X→ S . Par l’expression torseur fini (resp. quasi-fini) sur X, on entendra un torseur sur X au sens f pqc sous l’action d’un S-schéma en groupes fini et plat (resp. quasi-fini, affine et plat). 2.2. Torseurs et sections On utilisera tout le long de ce travail l’énoncé suivant qui assure la représentativité du quotient d’un schéma sous l’action d’un schéma en groupes, sous certaines hypothèses, énoncé pour lequel nous référons à [Ana73], théorème 7, appendice 1. La compatibilité du quotient (par l’action d’un schéma en groupes de type fini) et du changement de base est assurée par [SGA3, Exposé IV, 3.4.3.1]. Théorème 2.1. Soit T un schéma localement noethérien. Soient Z → T un T -schéma localement de type fini et quasi-fini, et H → T un schéma en groupes affine plat et quasi fini agissant sur Z . Supposons que le morphisme naturel Z ×T H → Z ×T Z soit une immersion fermée. Le faisceau (Z/H)f pqc est alors représenté par un schéma Z/H . De plus le morphisme canonique Z→ Z/H est fidèlement plat et le morphisme canonique Z ×T H → Z ×Z/H Z est un isomorphisme, ce qui fait de Z → Z/H un H-torseur . Corollaire 2.2. Soit S un schéma de Dedekind, G→ S un S–schéma en groupes affine, plat et quasi-fini (resp. fini) et H ⊂ G un sous-schéma en groupes fermé plat sur S . Soit X→ S un S-schéma séparé, localement de type fini et fidèlement plat et Y → X un torseur sous G. Alors Y → Y /H est fidèlement plat et le morphisme Y /H → X issu de la factorisation Y → Y /H → X est affine, plat et quasi-fini (resp. fini). En particulier Y /H → S est séparé. Démonstration. Ces propriétés sont locales pour la topologie fppf. Pour ce qui concerne la fidèle platitude de Y → Y /H , il suffit de montrer que G→ G/H est fidèlement plat, ce qui est une conséquence du théorème 2.1 et du fait que le morphisme µ : G×SH → G×S G, défini par µ(g,h) = (g,gh) est une immersion fermée. 4 M. Antei, M. Emsalem et C. Gasbarri4 M. Antei, M. Emsalem et C. Gasbarri La platitude de Y /H → X provient de la platitude de Y → X et de la fidèle platitude de Y → Y /H . Pour le reste de l’énoncé, il suffit donc de montrer que G/H → S est affine et quasi-fini (resp. fini). Le morphisme G/H → S est quasi-fini : il suffit de montrer que ce morphisme est localement de type fini. Cette propriété est locale sur la source ([SP, Lemma 34.25.2, Tag 036O]). Puisque G→ S est quasi-fini et G→ G/H est fidèlement plat, le morphisme G/H → S est quasi-fini. Le morphisme G/H → S est séparé : en effet si l’on note ∆ : G/H → G/H ×S G/H la diagonale, le diagramme suivant est cartésien G ×S H µ // �� G ×S G �� G/H ∆ // G/H ×S G/H où les flèches verticales sont fidèlement plates et µ(g,h) = (g,gh). Comme µ est une immersion fermée, il en est de même de ∆. Le morphisme G/H → S est quasi-compact : G→ S l’est et G→ G/H est surjectif. On peut donc appliquer le théorème principal de Zariski ([SP], Lemma 36.38.3, Tag 05K0), qui nous assure l’existence d’un diagramme commutatif G/H !! j // T π �� S où π est fini et j est une immersion ouverte. En se restreignant à un ouvert affine de S , on peut supposer T affine de dimension 1. D’après le lemme 32.37.2 de [SP, Tag 09N9], G/H est affine. Enfin si G est fini sur S , quitte à se restreindre à un ouvert affine de S , l’algèbre de G/H est contenue dans l’algèbre de G, qui est finie par hypothèse, et est donc aussi finie sur S . Donc G/H est fini sur S . � Définition 2.3. Supposons que l’on soit dans les hypothèses du corollaire 2.2. Soient T → X et Y → X respectivement un H–torseur et un G–torseur. On dira que T → X est obtenu par réduction de schéma en groupes structural de G à H à partir du G-torseur Y → X, s’il existe un diagramme commutatif T �� ι // Y �� X qui est de plus H ↪→ G-équivariant. Notons que ι est automatiquement une immersion fermée. Dans cette situation, d’après le théorème 2.1, le quotient Y /H est représenté par un schéma et le morphisme Y → X se factorise à travers Y /H → X. En termes cohomologiques, le torseur Y → X est obtenu par réduction de schéma en groupes structural de G à H si et seulement si sa classe dans H1(X,G) est contenue dans l’image de l’application naturelle d’ensembles pointés H1(X,H)→H1(X,G). Lemme 2.4 (cf. [DG70], chapitre III, §4, n◦ 4, p. 373). Soit Y → X un G-torseur sous un schéma en groupes affine G et H ⊂ G un sous-schéma en groupes fermé. Le diagramme Y /H // �� X �� BH // BG est 2-cartésien, où BG et BH désignent les champs classifiants des G-torseurs et H-torseurs respectivement. Dans la situation précédente, si on laisse tomber l’hypothèse de quasi-finitude, Y /H est un espace algébrique. C’est ainsi qu’il doit être compris dans le lemme 2.4. Nous utiliserons le lemme précédent sous la forme suivante : Schéma en groupes fondamental 5Schéma en groupes fondamental 5 Lemme 2.5. Dans les hypothèses du corollaire 2.2, il existe une correspondance biunivoque, stable par changement de base, entre sections s de Y /H au dessus de X et réductions T → X du schéma en groupes structural de G à H pour le G-torseur Y → X. Cette correspondance est donnée par le diagramme cartésien T // �� Y �� X s // Y /H. Voici un corollaire dont l’intérêt s’éclairera à la section 4. Corollaire 2.6. Supposons que l’on soit sous les hypothèses du corollaire 2.2. Soit X ′→ S un morphisme fidèlement plat et localement de type fini. Soit g : X ′ → X un S-morphisme tel que OX → g∗OX ′ soit un isomorphisme. Soit Y ′→ X ′ le G-torseur obtenu comme tiré par g du torseur Y sur X. Alors Y ′ → X ′ est obtenu par réduction de schéma en groupes structural de G à H si et seulement si Y → X l’est. Démonstration. Seulement une direction nécessite une preuve. On dispose du diagramme cartésien Y ′/H // j̃ ′ �� Y /H j̃ �� X ′ g // X D’après le lemme 2.5, l’hypothèse se traduit par l’existence d’une section X ′ → Y ′/H du morphisme canonique j̃ ′ qui, composée avec le morphisme naturel Y ′/H → Y /H donne un morphisme s′ : X ′→ Y /H qui s’insère dans le diagramme commutatif Y ′/H // j̃ ′ �� Y /H j̃ �� X ′ g // s′ ;; X . Le morphisme s′ induit un morphisme de OX-faisceaux j̃∗(OY /H ) → g∗(OX ′ ) ' OX . Du fait que j̃ est affine, on obtient une section s : X → Y /H ([SP, Lemma 28.11.5, Tag. 01SA]) telle que s ◦ g = s′ et donc d’après le lemme 2.5 l’existence d’un H-torseur Z→ X contenu dans le G-torseur Y → X. � Le corollaire 2.6 a l’interprétation cohomologique suivante : sous les hypothèses du corollaire, soient g∗ : H1(X,G) → H1(X ′ ,G), α : H1(X,H) → H1(X,G) et α′ : H1(X ′ ,H) → H1(X ′ ,G) les applications naturelles, alors im(α) = (g∗)−1(im(α′)). 2.3. Un lemme technique Lemme 2.7. Soit S un schéma de Dedekind. Soient X → S et X ′ → S respectivement un S–schéma localement de type fini et fidèlement plat et un S-schéma localement de type fini. Soit w : X ′→ X un S-morphisme. Alors w est un isomorphisme sous l’une des hypothèses suivantes : (1) X et X ′ sont intègres, w est fini et on suppose qu’il existe un ouvert dense U ⊂ X tel que la restriction de w à U ′ = w−1(U ) soit un isomorphisme de U ′ sur U , et X est normal en tous les points de X \U ; (2) X et X ′ sont intègres, w est fini, X est normal en tout point hors de la fibre générique, et la restriction wη de w à la fibre générique est un isomorphisme X ′η ' Xη ; (3) X ′ → S est plat, w est fini et surjectif, la restriction wη de w à la fibre générique est un isomorphisme X ′η ' Xη et pour tout point s ∈ S , la fibre Xs est réduite. 6 M. Antei, M. Emsalem et C. Gasbarri6 M. Antei, M. Emsalem et C. Gasbarri (4) X et X ′ sont intègres, X ′ → S est fidèlement plat, w est quasi-fini et séparé, on suppose qu’il existe un ouvert dense U ⊂ X tel que la restriction de w à U ′ = w−1(U ) soit un isomorphisme de U ′ sur U et, pour tout point s ∈ S , la fibre Xs est normale et intègre, Us , ∅ et ws est un morphisme fini. Démonstration. (1) Paraphrasant la preuve du lemme 8.12.10.1 de [EGA4], posons A = w∗(OX ′ ). Avec cette notation X ′ ' SpecA. Pour tout x ∈ X, OX,x ⊂ Ax ⊂ R(X) où R(X) désigne le corps des fonctions de X. Il s’agit de montrer que pour tout x ∈ X, OX,x = Ax. Si x < U , OX,x est intégralement clos et Ax est entier sur OX,x, et donc OX,x =Ax. Si x ∈U , w étant un isomorphisme de w−1(U ) sur U , OX,x =Ax encore. (2) Avec les notations précédentes, il s’agit encore de prouver que OX,x = Ax pour tout x ∈ X. On se trouve donc dans la situation du point (1) où le schéma de Dedekind de base est SpecOS,s, si l’on a désigné par s l’image de x dans S , du fait que le point générique η est ouvert dans SpecOS,s. (3) La preuve est une adaption de celle du lemme 1.3 de [WW80] . Il suffit de montrer que pour tout point fermé s ∈ S , la restriction de w au dessus de SpecOS,s est un isomorphisme. On est ramené au cas où S est le spectre d’un anneau de valuation discrète R avec corps de fractions K et idéal maximal engendré par π. De la surjectivité de w on déduit que sur la fibre spéciale ws : X ′s→ Xs est surjectif ; on peut supposer X et X ′ affines, X = Spec(A) et X ′ = Spec(A′) : les hypothèses impliquent qu’on a une inclusion A ⊂ A′ ⊂ A⊗R K . Comme Xs est réduit, on en déduit que w# s : OXs ↪→ (ws)∗(OX ′s ) est injectif ([EGA1], corollaire 1.2.7) donc πA′ ∩A = πA , ce qui implique la conclusion dans ce cas. (4) Le morphisme w : X ′→ X se factorise en w = w′′ ◦w′ , où w′ : X ′→ X ′′ est une immersion ouverte, X ′′ est intègre et w′′ : X ′′→ X est fini ([SP, Lemma 36.38.3, Zariski’s main theorem, Tag 05K0]). Par ailleurs l’hypothèse implique que X est normal ([Mat89, Theorem 23.9] et son corollaire), et le point (1) assure alors que w′′ est un isomorphisme. On conclut que w est une immersion ouverte. Pour tout point s ∈ S , l’immersion ouverte des fibres en s, U ′s ⊂ X ′s se factorise en U ′s ⊂ Ts ⊂ X ′s, où U ′s ⊂ Ts est un ouvert dense de Ts et js : Ts→ X ′s est une immersion fermée. Le morphisme ts = ws ◦ js est fini, donc propre, et l’image ts(Ts), qui est fermée et contient l’ouvert dense Us, est Xs tout entier. On en déduit que ws est surjectif, ceci pour tout s ∈ S , d’où on conclut que w est surjectif. L’immersion ouverte w qui est surjective est un isomorphisme. � Remarque 2.8. Il ressort de la preuve du point (4) que, si l’on supprime l’hypothèse que pour tout point s ∈ S , Us , ∅ et ws est fini, on conclut néanmoins que w est une immersion ouverte. 3. Réduction de schéma en groupes structural Dans tout le paragraphe on considère un schéma de Dedekind S , un S–schéma X→ S séparé, fidèlement plat et localement de type fini, et un schéma en groupes affine plat G→ S . On se donne un ouvert dense U ⊂ X dont on note S ′ l’image dans S par le morphisme fidèlement plat X → S (S ′ est donc un ouvert contenant le point générique η de S) et un sous-schéma en groupes fermé H ′ ⊂ GS ′ plat sur S ′ . Soit Y → X un G-torseur et YU → U sa restriction à U . La question générale est la suivante. Supposons que YU → U admette une réduction de schéma en groupes structural Z ′ → U de GS ′ à H ′ ⊂ GS ′ (correspondant à une section s′ : U → YU /H ′), le torseur Y → X admet-il lui-même une réduction de schéma en groupes structural Z → X de G à un sous-schéma en groupes fermé H ⊂ G plat sur S dont la restriction à U est précisément Z ′→U ? Au vu du lemme 2.4, cela se traduit par l’existence d’une section s : X → Y /H rendant commutatif le diagramme suivant : Schéma en groupes fondamental 7Schéma en groupes fondamental 7 YU /H ′ // Y /H U s′ OO // X s OO . Remarquons que si X est intègre, U est un ouvert schématiquement dense dans X, et la section s, si elle existe, est unique. Observons encore que dans le diagramme précédent, H est nécéssairement l’adhérence schématique dans G de la restriction H ′η de H ′ à la fibre générique. 3.1. Le cas où X→ S est à fibres réduites On suppose ici que pour tout point s ∈ S , la fibre Xs est réduite (en particulier X est réduit, cf. [EGA1, prop. 9.5.9]). Proposition 3.1. On suppose que pour tout point s ∈ S , Xs est réduit et que G un S-schéma en groupes fini et plat. Soient Y → X un G-torseur et H ′ un sous-schéma fermé en groupes de Gη . On suppose que Yη → Xη admet une réduction Z ⊂ Yη de schéma en groupes structural à H ′ . Alors le G-torseur Y → X admet lui-même une réduction Z ⊂ Y de schéma en groupes structural à H ′ , où Z (resp. H ′) désigne la clôture schématique de Z dans Y (resp. de H ′ dans G). Démonstration. La section s : Xη → Yη/H ′ qui est une immersion fermée s’étend en une immersion fermée s′ : X ′→ Y /H ′ où X ′ désigne la clôture schématique de Xη dans Y /H ′ . Le morphisme u : X ′→ X, composé du morphisme fini Y /H ′→ X et de l’immersion fermée s′ , est fini. La restriction à la fibre générique est un isomorphisme uη : X ′η ' Xη . L’image u(X ′) est un fermé contenant Xη qui est dense dans X, et donc u est surjectif. On peut donc appliquer le point 3 du lemme 2.7, pour conclure que u est un isomorphisme et donc l’existence d’une section X→ Y /H ′ . De plus Z ⊂ Y est naturellement muni d’une action de H ′ compatible avec l’action de G sur Y , provenant de l’action de H ′ sur Z compatible avec celle de Gη sur Yη , et des propriétés fonctorielles de la clôture schématique. On en déduit une immersion fermée Z/H ′ ⊂ Y /H ′ , qui restreinte à la fibre générique coïncide avec Z/H ′ = Xη ⊂ Yη/H ′ . Par ailleurs Z/H ′ est plat sur S , ce qui assure que Z/H ′ ⊂ Y /H ′ est la clôture schématique X ′ ' X de Xη dans Y /H ′ . On aboutit au diagramme commutatif suivant (automatiquement cartésien) : Z // �� Y �� Z/H ′ = X // Y /H ′ où les flèches horizontales sont des immersions fermées, celle du haut étant H ′-équivariante. � 3.2. Le cas normal Dans cette section, inspirée par [Nor82, Chapter II], on établira des énoncés similaires à la proposition 3.1 sous des hypothèses de normalité. 3.2. Le cas G→ S fini Nous aurons besoin du lemme technique suivant. Lemme 3.2. Considérons un carré cartésien de schémas V v // j �� Z j ′ �� U u // X 8 M. Antei, M. Emsalem et C. Gasbarri8 M. Antei, M. Emsalem et C. Gasbarri où les flèches horizontales sont des immersions ouvertes, u(U ) étant dense dans X, et les flèches verticales des morphismes finis. On suppose Z localement noethérien et X intègre et normal en tout point de X \ u(U ). Alors s’il existe une section s : U → V de j, il existe une section s′ : X → Z de j ′ étendant la section s et rendant le diagramme évident cartésien. Démonstration. Posons t = v ◦ s. C’est une immersion, qui est quasi-compacte d’après [SP, Lemma 27.5.3, Tag 01OX]. Il s’ensuit que t est la composée t = b◦a de l’immersion ouverte a :U → t(U ) et de l’immersion fermée b : t(U ) ↪→ Z ([SP, Lemma 28.3.2, Tag 01QV]), où t(U ) est réduit et irréductible, car U est intègre, et donc intègre. On pose w = j ′ ◦ b qui est fini et rend commutatif le diagramme U a // = �� t(U ) w �� U // X . L’existence de la section s′ est la conséquence du point 1 du lemme 2.7. Le diagramme suivant est commu- tatif U s // u �� V j // v �� U u �� X s′ // Y j ′ // X . Le grand rectangle et le carré de droite sont cartésiens. Il s’ensuit que le carré de gauche est cartésien. � Proposition 3.3. Soit f : X → S un S-schéma fidèlement plat localement de type fini et intègre. Soit U un ouvert dense de X, S ′ = f (U ) ⊂ S et supposons que X soit normal en tous les points en dehors de U . Soit G un S-schéma en groupes fini et fidèlement plat et Y → X un G-torseur. Si la restriction à U de Y → X admet une réduction T ⊂ YU de schéma en groupes structural de GS ′ à H ′ où H ′ ⊂ GS ′ est un sous-schéma en groupes fermé fidèlement plat sur S ′ , le G-torseur Y → X admet lui-même une réduction Tη ⊂ Y de schéma en groupes structural de G à H ′η , où Tη (resp. H ′ η ) désigne la clôture schématique de Tη (resp. H ′ η ) dans Y (resp. dans G). Démonstration. On remarque d’abord que par l’unicité de la clôture schématique, du fait que H ′ → S ′ est plat, la restriction à S ′ de H ′η est H ′ . Il y a une action de (H ′η)X sur Y compatible avec l’action de GX et qui, tiré en arrière sur U , donne l’action de H ′ sur YU . La compatibilité du quotient et du changement de base entraîne que le diagramme suivant est cartésien YU /H ′ v // j �� Y /H ′η j ′ �� U u // X . Le lemme 3.2 prouve l’existence d’une section de j ′ . On conclut la preuve comme celle de la proposition 3.1. � 3.2. Le cas G→ S quasi-fini On suppose ici que G→ S est affine et quasi-fini. Proposition 3.4. Soit f : X → S un S-schéma séparé, fidèlement plat et localement de type fini. Soit U un ouvert dense de X, S ′ = f (U ) ⊂ S et supposons que pour tout point z ∈ S , la fibre Xz soit intègre et normale (cf. la remarque 4.1). Soit G un S-schéma en groupes affine et quasi-fini et plat. On se donne un G-torseur Y → X. Supposons que la restriction à U de Y → X admet une réduction de schéma en groupes structural à H ′ , où H ′ ⊂ GS ′ est un sous-schéma fermé en groupes quasi-fini et fidèlement plat sur S ′ , que l’on notera T →U . Alors le G-torseur Y → X lui-même admet une réduction Tη ⊂ Y de schéma en groupes structural à H ′η ⊂ G, où Tη (resp. H ′ η ) désigne la clôture schématique de Tη (resp. H ′ η ) dans Y (resp. G), si l’une des deux conditions suivantes est vérifiée : Schéma en groupes fondamental 9Schéma en groupes fondamental 9 (1) S = S ′ ; (2) pour tout point fermé s ∈ S , la restriction à SpecOS,s de la composée Tη → Yη → Y n’est pas une immersion fermée. Démonstration. D’après le théorème 2.1 les quotients par des schémas en groupes quasi-finis et plats existent ; on considère le diagramme suivant : (3.1) YU /H ′ j ′′ U �� u // Y /H ′η j ′′ �� X ′ w ## . � b == U s SS a ;; i // X où u,a, i sont immersions ouvertes, s,b sont des immersions fermées, j ′′ est quasi-fini et affine d’après le corollaire 2.2, t := u ◦ s et X ′ := t(U ) l’image schématique (muni de la structure de schéma réduit). Le schéma X ′ est réduit et irréductible, donc intègre. Le morphisme w est affine et donc séparé. Il ressort de la remarque 2.8 que w est une immersion ouverte. Si S = S ′ , pour chaque point s ∈ S , (Y /H ′η)s ' Ys/(H ′η)s est un quotient par un schéma en groupes fini, et d’après le corollaire 2.2, j ′′s et donc ws est fini. Les hypothèses du point 4 du lemme 2.7 sont vérifiées, w est un isomorphisme. Ceci prouve la proposition sous l’hypothèse (1). Si S ′ , S , d’après la première partie de l’énoncé, on est dans la situation suivante : on dispose d’une section s : XS ′ → YS ′ /H ′ du morphisme YS ′ /H ′ → XS ′ , où H ′ ⊂ GS ′ est un sous-schéma fermé en groupes quasi-fini et plat sur S ′ . Par unicité, il suffit d’étendre cette section au dessus du spectre de l’anneau local de S en tout s ∈ S \ S ′ . On est donc ramené au cas où S = Spec(R), R étant un anneau de valuation discrète, et S ′ = {η}, U = Xη , T = Tη et H ′ = H ′η . On observe d’abord que f ◦w(X ′) = S . En effet le diagramme suivant est cartésien : T // �� Yη �� // Y �� T /H ′′ = Xη s // Yη/H ′ u // Y /H ′ et le morphisme T → Yη → Y est une immersion fermée si et seulement si Xη → Yη/H ′→ Y /H ′ l’est aussi. Par définition ce dernier se factorise en Xη → X ′ → Y /H ′ . Puisque l’on a supposé que T → Yη → Y n’est pas une immersion fermée, comme X ′→ Y /H ′η est une immersion fermée par définition, alors a : Xη → X ′ n’est pas une immersion fermée, et en particulier n’est pas un isomorphisme. Si l’image f ◦w(X ′) était S ′ , w prendrait ses valeurs dans Xη , et w ◦ a serait l’identité de Xη . Comme w et a sont des immersions ouvertes, cela impliquerait que ce sont des isomorphismes, ce qui est impossible. Donc X ′ se surjecte sur S . On est dans la situation suivante : (3.2) (Y /H ′)X ′ �� // Y /H ′ j ′′ �� X ′ w %% b 99 X 10 M. Antei, M. Emsalem et C. Gasbarri10 M. Antei, M. Emsalem et C. Gasbarri d’où l’existence d’une section b′ de la première flèche verticale. Or, (Y /H ′)X ′ ' YX ′ /H ′ ([SGA3, Exposé IV, 3.4.3.1]) où YX ′ → X ′ est un G-torseur. Le G-torseur YX ′ → X ′ admet une réduction de schéma en groupes structural de G à H ′ , et d’après le point (1) de la proposition, il en est de même pour le G-torseur Y → X lui-même. Comme dans la preuve de la proposition 3.1, on conclut que la réduction du schéma en groupes structural de G à H ′ de Y → X est Tη ⊂ Y . Il est clair par ailleurs que, comme la rectriction à U de la section b′ est la section s de départ, la restriction à U de la section X→ Y /H ′ à U est aussi s. Cela signifie que la restriction à U de la réduction du schéma en groupes structural de G à H ′ obtenue est isomorphe à la donnée de départ T →U . � Remarque 3.5. Voici un exemple, qui explique pourquoi, dans la proposition 3.4, on a introduit l’hypothèse que Tη ↪→ Yη ↪→ Y n’est pas une immersion fermée. En général l’adhérence schématique du torseur T n’est pas forcément un torseur sous l’adhérence schématique de H ′ : on prend X = S = Spec(R) le spectre d’un anneau de valuation discrète de caractéristique positive p, d’uniformisante π, G = SpecR[X]/(πp−1Xp−X), H ′ réduit à l’élément neutre de Gη et T = {x = 1/π}. Le sous-schéma fermé T de Gη est fermé dans G (pas de spécialisation en dehors de lui-même). Et T n’est pas un torseur sous H ′ qui est réduit à l’élément neutre de G. Voici une version pointée de la proposition 3.4. Proposition 3.6. Les hypothèses sont celles de la proposition 3.4. On suppose que X est pointé par x ∈ X(S) et Y par y ∈ Yx(S), et que yS ′ ∈ T (S ′). Alors Y → X admet une réduction de schéma en groupes structural de G à H ′η , Tη → X, pointée en y, et dont la restriction à U est isomorphe à T →U . Démonstration. Il suffit de montrer que dans ces conditions, si S ′ , S , la seconde condition de la proposition 3.4 est vérifiée. Après localisation en un point fermé s ∈ S , ys < Tη et ys est dans l’adhérence de Tη dans Y . Donc Tη ↪→ Yη → Y n’est pas une immersion fermée. � Corollaire 3.7. Les énoncés précédents (propositions 3.3 et 3.6) restent valables si l’on remplace l’ouvert U par la fibre générique Xη . Démonstration. En effet, les réductions des schémas en groupes structuraux reviennent à montrer l’existence d’une section du morphisme naturel Y /H ′η → X, tout en sachant que cette section existe sur la fibre générique. Le lemme 3.8 permet d’étendre cette section au dessus d’un ouvert de S et de se ramener aux hypothèses des propositions 3.3 et 3.6. � Lemme 3.8. Soit S un schéma intègre et π1 : Z1→ S et π2 : Z2→ S deux S-schémas localement de présentation finie et séparés. On suppose de plus que Z1 et Z2 sont quasi-compacts et que π2 est ouvert. Soit a : Z1 → Z2 un S-morphisme affine. Si la restriction aη de a à la fibre générique admet une section sη , il existe un ouvert non vide V de S et une unique section sV de aV : Z1 ×S V → Z2 ×S V dont la restriction à la fibre générique est sη . Démonstration. Le théorème 8.8.2 de [EGA4] s’applique à notre situation et assure l’existence d’un ouvert V ⊂ S et d’un morphisme sV : Z2,V → Z1,V prolongeant sη . Comme π2 est séparé, sV est une section de aV . L’unicité provient de la séparation de π1 et du fait que la fibre générique est dense dans Z2. � 4. Le schéma en groupes fondamental L’objectif est de démontrer qu’une certaine catégorie de torseurs pointés sur un certain S-schéma de base X → S sous certains S-schémas en groupes est cofiltrée. On rappelle les conditions portant sur un S-schéma X connexe qu’on sera amené à considérer : (A) X→ S est localement de type fini, séparé, fidèlement plat, et pour tout point s ∈ S , Xs est réduit ; (B) X→ S est localement de type fini, séparé, fidèlement plat, intègre et normal ; (C) X→ S est localement de type fini, séparé, fidèlement plat, et pour tout point s ∈ S , Xs est intègre et normal. Schéma en groupes fondamental 11Schéma en groupes fondamental 11 Remarque 4.1. L’hypothèse (C) implique l’hypothèse (B) : du fait que la fibre générique Xη est intègre on déduit aisément l’intégrité de X. Ensuite la normalité de S et de chaque fibre entraîne la normalité de X (cf. [Mat89, Theorem 23.9] et son corollaire). Résumons les résultats obtenus dans la section 3. On suppose que X → S satisfait (A) ou (B) (resp. (C)). Soient G → S un schéma en groupes plat et fini (resp. affine et quasi-fini) et Y → X un G-torseur. Si la fibre générique Yη → Xη admet une réduction à un H ′-torseur Z ′ ⊂ Yη , où H ′ ⊂ Gη est un sous-schéma en groupes fermé, alors la clôture schématique H ′ de H ′ dans G est un sous-schéma en groupes fermé, plat et fini (resp. affine et quasi-fini), et la clôture schématique Z ′ ⊂ Y est une réduction du G-torseur Y → X à un H ′-torseur. De plus, si les torseurs sont pointés, il en est de même de leur réduction Si X → S est un morphisme fidèlement plat et x ∈ X(S) est un point fixé, alors on définit, dans l’esprit de [Gas03], la catégorie P (X) (resp. Qf (X)) des torseurs sous l’action d’un schéma en groupes fini (resp. quasi-fini) et plat, pointés au dessus de x. Chaque objet est donc un triplet (Y ,G,y) où G est un S-schéma en groupes fini (resp. quasi-fini) et plat, Y est un G-torseur pointé en y ∈ Yx(S). Un morphisme de triplets ϕ : (Y ,G,y)→ (Z,H,z) est la donnée d’un morphisme de schémas en groupes G→ H et un morphisme de X- schémas pointés Y → Z tels que le diagramme suivant soit commutatif G ×Y �� // Y �� H ×Z // Z. On montre le théorème suivant : Théorème 4.2. Soit X un schéma connexe, localement de type fini et fidèlement plat sur S . Soit x ∈ X(S) un point. (1) si l’une des conditions (A) ou (B) est vérifiée, la catégorie P (X) est cofiltrée ; de plus dans P (X) les produits fibrés finis existent ; (2) si la condition (C) est vérifiée, la catégorie Qf (X) est cofiltrée ; de plus dans Qf (X) les produits fibrés finis existent ; (3) sous l’hypothèse (C), le foncteur naturel P (X) ↪→ Qf (X) est pleinement fidèle et commute aux produits fibrés finis. Démonstration. (1). On présente ici la preuve sous l’hypothèse (A) ; sous l’hypothèse (B) la preuve est similaire à la lumière des résultats obtenus à la section 3.2.1. Puisque P (X) a un objet final (à savoir (X, {1}S ,x)) et les produits fibrés sur X existent dans P (X), il suffit de démontrer que pour trois objets quelconques (Yi ,Gi , yi), i = 0,1,2 de P (X) et deux morphismes ϕi : (Yi ,Gi , yi) → (Y0,G0, y0), i = 1,2, il existe un quatrième objet (Y3,G3, y3) et deux morphismes ψi : (Y3,G3, y3) → (Yi ,Gi , yi), i = 1,2 qui clôturent le carré. Soient Xη et (Yi,η ,Gi,η , yi,η), i = 0,1,2 les fibres génériques de X et (Yi ,Gi , yi) respectivement. Le schéma Xη étant connexe, réduit et muni d’un point rationnel, d’après [Nor82, Chapter II, Propositions 1 and 2], Y1,η ×Y0,η Y2,η est un G1,η ×G0,η G2,η-torseur au dessus de Xη (pointé en y1,η ×y0,η y2,η ). D’après la proposition 3.1, on construit le G3-torseur Y3 ↪→ Y1 ×X Y2 en prenant la clôture du G1,η ×G0,η G2,η-torseur Y1,η ×Y0,η Y2,η dans le G1 ×S G2-torseur Y1 ×X Y2. Les restrictions ψi à Y3 des projections Y1 ×X Y2→ Yi , i = 1,2, vérifient ϕ1 ◦ψ1 = ϕ2 ◦ψ2 par fonctorialité de la clôture schématique. Finalement le point y3 est, bien sûr, l’adhérence de y1,η ×y0,η y2,η dans Y3. Il est clair que l’objet (Y3,G3, y3) est le produit fibré dans la catégorie P (X) de (Y1,G1, y1) et (Y2,G2, y2) au dessus de (Y0,G0, y0). La preuve du point (2) cas quasi-fini est semblable, en utilisant la proposition 3.6. Enfin la dernière assertion (3) provient du caractère fonctoriel de la clôture schématique. � De la conclusion du théorème 4.2 il résulte que les pro-objets des catégories P (X) et Qf (X) sont re- présentables par des schémas ([EGA4, prop. 8.2.3]). On notera P ro − P (X) et P ro −Qf (X) ces catégories de pro-objets. On déduit du théorème 4.2 l’existence de pro-objets universels : un triplet (X̂,π1(X,x), x̂) (resp. (X̂qf,π1(X,x)qf, x̂qf)) objet de P ro −P (X) (resp. objet de P ro −Qf (X)) plats sur S , avec la proprieté 12 M. Antei, M. Emsalem et C. Gasbarri12 M. Antei, M. Emsalem et C. Gasbarri universelle suivante : pour tout triplet (P ,G,x) objet de P ro − P (X) (resp. de P ro − Qf (X)), il existe un unique morphisme (X̂,π1(X,x), x̂)→ (P ,G,x) dans P ro −P (X) (resp.(X̂qf,π1(X,x)qf, x̂qf)→ (P ,G,x) dans P ro −Qf (X)). Les objets de P (X) (resp. Qf (X)) sont en correspondance bijective avec les S-morphismes π1(X,x) → G (resp. π1(X,x)qf → G) où G → S est un schéma en groupes fini (resp. quasi-fini) et plat, le torseur correspondant à un morphisme ϕ : π1(X,x) → G (resp. ϕ : π1(X,x)qf → G) étant le produit contracté X̂ ∧π1(X,x)G (resp. X̂qf ∧π1(X,x)G) à travers ϕ. Définition 4.3. Soit X un schéma connexe localement de type fini et fidèlement plat sur S . (1) On suppose qu’une des deux conditions (A) ou (B) est vérifiée. Alors le triplet (X̂,π1(X,x), x̂) est appelé triplet universel de P ro − P (X), le S-schéma en groupes π1(X,x) est appelé le schéma en groupes fondamental de X au point x et X̂→ X est appelé le π1(X,x)-torseur universel. (2) On suppose la condition (C) vérifiée. Alors le triplet (X̂qf,π1(X,x)qf, x̂qf) est appelé triplet universel de P ro − Qf (X), le S-schéma en groupes π1(X,x)qf est appelé le schéma en groupes fondamental quasi-fini de X au point x et X̂qf→ X est appelé le π1(X,x)qf-torseur universel. 5. Torseurs galoisiens Dans ce paragraphe X désigne un schéma connexe localement de type fini et plat sur un schéma de Dedekind S , pointé par une section x ∈ X(S), qu’on suppose vérifier l’une des conditions (A), (B) ou (C). Définition 5.1. On dira qu’un objet des catégories P ro − P (X) et P ro − Qf (X) est génériquement fini si sa fibre générique est finie. De même un S-schéma en groupes affine sera dit génériquement fini si sa fibre générique est finie. Un objet génériquement fini (T ,M,t) de P ro − P (X) est dit galoisien (resp. quasi-galoisien) si, pour tout morphisme (g,ϕ) : (Z,Q,z)→ (T ,M,t) d’objets génériquement finis de P ro −P (X), ϕ est fidèlement plat (resp. schématiquement dominant). Un objet génériquement fini (T ,M,t) de P ro −Q(X) est dit qf-galoisien (resp. quasi-qf-galoisien) si, pour tout morphisme (g,ϕ) : (Z,Q,z)→ (T ,M,t) d’objets génériquement finis de P ro −Qf (X), ϕ est fidèlement plat (resp. schématiquement dominant). Lemme 5.2. Tout morphisme ϕ :H → G entre S-schémas en groupes affines et plats sur un schéma de Dedekind S admet une factorisation, unique à isomorphisme près, H ϕ // γ �� G G′′ β // G′ α OO où G′ et G′′ sont des schémas en groupes affines et plats sur S , α est une immersion fermée, β un morphisme modèle (i.e. un isomorphisme sur la fibre générique) et γ fidèlement plat. Si ϕ est schématiquement dominant, α est un isomorphisme. Si ϕ est fidèlement plat, α et β sont des isomorphismes. Si H est quasi-fini (resp. fini), il en est de même de G′′ . Si G est quasi-fini (resp. fini) il en est de même de G′ et G′′ est génériquement fini. Démonstration. On se ramène au cas du spectre S = Spec(R) d’un anneau de Dedekind. Le morphisme ϕ correspond à un morphisme d’algèbres de Hopf ϕ̃ : RG→ RH , dont l’image est une algèbre de Hopf qu’on écrit sous la forme RG′ ⊂ RH . Le morphisme α : G′ → G correspondant à la surjection RG→ RG′ est une immersion fermée. On considère ensuite le saturé KG′ ∩RH de RG′ dans RH , qui est aussi une algèbre de Hopf que l’on note RG′′ . Toutes ces algèbres de Hopf sont sans R-torsion, donc plates sur R. D’après le théorème 4.1.1 de [DH18], le morphisme γ :H → G′′ correspondant à l’inclusion RG′′ ⊂ RH est fidèlement plat. Et par construction β : G′′→ G′ est un morphisme modèle (en particulier schématiquement dominant). L’unicité est claire, et le reste de la première partie de l’énoncé s’en déduit. Si H est quasi-fini, du fait que H → G′′ est surjectif, pour vérifier que G′′ est quasi-fini, il suffit de voir que G′′→ S est localement de type fini. Cette propriété étant locale sur la source ([SP, Lemma 34.25.2, Tag Schéma en groupes fondamental 13Schéma en groupes fondamental 13 036O]), comme H → G′′ est fidèlement plat, et H → S est localement de type fini, il en est de même de G′′→ S . Le reste de l’énoncé est clair. � Lemme 5.3. Soient ϕ : G1→ G2 et ψ : G2→ G3 des morphismes de schémas en groupes affines et plats sur un schéma de Dedekind S . Si ψ ◦ϕ est fidèlement plat (resp. schématiquement dominant), il en est de même de ψ. Démonstration. On considère les morphismes d’algèbres de Hopf correspondants : ϕ̃ : RG2 → RG1 et ψ̃ : RG3 → RG2. Par hypothèse, v = ϕ̃ ◦ ψ̃ est injectif, ce qui se traduit par ker(ϕ̃) ∩ im(ψ̃) = 0. Le morphisme ψ̃ est injectif. D’après le théorème 4.1.1 de [DH18], il suffit de montrer que l’image de RG3 par ψ̃ est saturée dans RG2. Soit donc f ∈ RG2, a ∈ R \ 0, et g ∈ RG3 tels que af = ψ̃(g). On en déduit aϕ̃(f ) = v(g) et il existe donc g ′ ∈ RG3 tel que ϕ̃(f ) = v(g ′) = ϕ̃◦ψ̃(g ′). On en déduit que ϕ̃(f −ψ̃(g ′)) = 0 et donc f − ψ̃(g ′) ∈ ker ϕ̃. Finalement af − ψ̃(ag ′) = ψ̃(g −ag ′) ∈ ker ϕ̃∩ im ψ̃ et donc af − ψ̃(ag ′) = 0 dans RG2 qui est sans R-torsion. On en déduit que f = ψ̃(g ′) est dans l’image de ψ̃ ce qu’il fallait démontrer. � Corollaire 5.4. Le torseur universel X̂x (resp. X̂ qf x ) est limite projective de torseurs pointés finis (resp. quasi-finis) quasi-galoisiens (resp. quasi-qf-galoisiens), et limite projective de torseurs génériquement finis galoisiens. Démonstration. On applique le lemme 5.2 à H = π1(X,x) (resp. H = πqf1 (X,x)), compte tenu du lemme 5.3. � Proposition 5.5. Soit X un schéma connexe fidèlement plat sur S pointé en x ∈ X(S). On suppose qu’une des conditions (A) ou (B) est vérifiée (resp. (C) est vérifiée). Soient U un ouvert non vide de X, S ′ := f (U ) un ouvert de S ; on suppose que xS ′ ∈ U et que pour tout point x ∈ X \U , l’anneau local Ox est intégralement clos. Alors π1(U,xS ′ )� π1(X,x)S ′ (resp. π qf 1 (U,xS ′ )� π qf 1 (X,x)S ′ ) est schématiquement dominant (c.-à-d. le morphisme dual sur les algèbres est injectif ). En particulier sous l’hypothèse (A) ou (B), π1(Xη ,xη)� π1(X,x)η est fidèlement plat et, sous l’hypothèse (C), π1(Xη ,xη)� π qf 1 (X,x)η et π qf 1 (X,x)η � π1(X,x)η sont fidèlement plats. Démonstration. Compte tenu du corollaire 5.4, on est amené à montrer que si (Y ,y) → (X,x) est un G- torseur fini (resp. quasi-fini), quasi-galoisien, le morphisme naturel ÛxS′ → YU (resp. Û qf xS′ → YU ) est schématiquement dominant. Soit ϕ : π1(U,xS ′ ) → GS ′ (resp. ϕ : πqf1 (U,xS ′ ) → GS ′ ) le morphisme cor- respondant au GS ′ -torseur YU →U . D’après le lemme 5.2, il se factorise en ϕ = α ◦λ, où α : G′→ GS ′ est une immersion fermée et λ est schématiquement dominant. Le torseur YU →U admet donc une réduction de schéma en groupes structural en un G′-torseur pointé Z→U . Il résulte des propositions 3.3 et 3.6 que le G-torseur Y → X admet lui-même une réduction de schéma en groupes structural en un G′η-torseur, où G′η désigne l’adhérence schématique de G′η dans G, dont la restriction à U est isomorphe à Z → U . Le fait que Y →U est quasi-galoisien entraine que G′η ' G et que Z ' Y comme G-torseurs. Il en résulte que Z ' YU comme GS ′ -torseurs et que α est un isomorphisme. Donc ϕ est schématiquement dominant, ce qu’il fallait démontrer. Le reste de l’énoncé est clair. � Proposition 5.6. Soient X et X ′ deux S-schémas connexes localement de type fini et fidèlement plats sur S , vérifiant une des conditions (A) ou (B). Soit g : X ′→ X un S-morphisme de schémas tel que OX → g∗(OX ′ ) est un isomorphisme. On suppose l’existence d’une section x′ ∈ X ′(S) et on note x := g(x′), alors π1(X ′ ,x′)� π1(X,x) est schématiquement dominant. C’est le cas en particulier si g : X ′ → X un S-morphisme propre, plat avec fibres géométriquement connexes et réduites. Démonstration. La preuve est la même que celle de la proposition 5.5 en utilisant le corollaire 2.6 à la place des propositions 3.3 et 3.6. � 6. Appendice : Le contre-exemple de Jilong Tong La construction du schéma en groupes fondamental d’un S-schéma dans [Gas03] repose sur l’énoncé suivant (lemme 2.2 de [Gas03]) : Soit S un schéma de Dedekind de point générique η = Spec(K) et G un schéma en groupes fini et plat sur S . Soit H ↪→ G un sous schéma en groupes. Soit X → S un S–schéma fidèlement plat réduit et irreductible. Soit 14 M. Antei, M. Emsalem et C. Gasbarri14 M. Antei, M. Emsalem et C. Gasbarri P → X un G–torseur et Y ⊂ Pη un sous-schéma fermé qui est un Hη-torseur. Alors la clôture schématique Y de Y dans P est un H-torseur. L’exemple suivant montre que les hypothèses sur X dans l’énoncé précédent sont insuffisantes. Soient ζ une racine primitive p-ième de 1 (p est un nombre premier), X = SpecZ[pζ] = SpecZ[V ]/(pp−1Φp(V /p)) où Φp(T ) = T p−1 T−1 = T p−1+· · ·+1. Soit P → X le µp-torseur trivial P := X×µp = SpecZ[V ,T ]/(pp−1Φp(V /p), T p − 1). On considère la flèche diagonale X Q ' µp \ {1} → (X × µp)Q = ((µp \ {1}) × µp)Q. C’est un mor- phisme de torseurs pour le morphisme de schémas en groupes 1→ µp. On note Y la clôture schématique de l’image ; alors Y = Spec(A) où la Z-algèbre plate A figure dans le diagramme suivant : Z[V ,T ]/(pp−1Φp(V /p),T p − 1) // A =Z[W ]/(Φp(W )) Z[V ]/(pp−1Φp(V /p)) OO 44 T →W , V → pW . La fibre en p de Y → X correspond au morphisme d’algèbres Fp[V ]/(V p−1) // Fp[W ]/(Φp(W )) V → pW = 0 qui se factorise à travers Fp[V ]/(V p−1)→ Fp→ Fp[W ]/(Φp(W )) et n’est donc pas plat. Donc Y → X n’est pas un torseur. Références [Ana73] S. 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